loge fidélité et prudence

créée en 1871 à genève, no 16

personnalités de la Loge Fidélité et Prudence

Favon Georges

Georges Favon (1843-1902)
Conseiller d'Etat, Conseiller national, Rédacteur du Genevois

Vénérable de la Loge Fidélité & Prudence de 1893 à 1895

 

Quelques aspects de sa vie

Publiscite et homme  politique, il joua un très grand rôle dans la vie sociale genevoise. Il fut le fondateur et le rédacteur jusqu'à sa mort du Petit Genevois qui devint plus tard le Genevois. Georges Favon entra au Grand Conseil en 1876 et fut conseiller d'Etat de 1899 à 1902. Il a fait partie en 1880 du Conseil des États . Il fut aussi élu au Conseil national. Il occupa le poste de Vénérable de la Loge Fidélité et Prudence de 1893 à 1895. Ses efforts d'homme politique amenèrent sur le plan genevois de très grands progrès sociaux. Au plan fédéral, il soutient la création de diverses assurances sociales dont l'Assurance Vieillesse et Survivants (AVS) et Assurance Invalidité (AI). Malheureusement ces projets furent refusés par le peuple en 1900. Ce n'est que 46 ans plus tard que l'idée de Favon se réalisa.  

Biographie et bref résumé de sa vie politique*

Né le 2.2.1843 à Plainpalais (auj. comm. Genève), mort le 17.5.1902 à Plainpalais, protestant puis libre-penseur, de Genève. Fils de François, riche marchand et propriétaire, et de Louise Choisy. Issu d'un milieu conservateur, Georges Favon passa son baccalauréat classique à l'académie de Genève, puis suivit des cours de droit à Heidelberg. Après avoir milité dans une association politique conservatrice (1864), il rallia le camp radical vers 1872. En 1875 il fonda Le Petit Genevois (devenu Le Genevois en 18777), organe du radicalisme populaire; Georges Favon conserva jusqu'à la mort la propriété et la rédaction du journal. Il fut député au Grand Conseil genevois (1876-1902), conseiller aux Etats (1880-1881), conseiller national (1881-1893, 1894-1902) et conseiller d'Etat chargé de l'instruction publique (1899-1902). Dès 1883, il donna un cours sur les systèmes sociaux à l'université de Genève.

Au sein du radicalisme genevois, Georges Favon appuya d'abord la politique anticatholique d'Antoine Carteret, puis il s'en éloigna et orienta le parti vers l'action sociale, prônant l'alliance avec les socialistes et courtisant même l'électorat catholique. En 1889 il se retrouva à la tête d'un parti cantonal divisé et désormais minoritaire, qu'il ramènera au pouvoir en 1897, allié aux socialistes. Georges Favon se signala aussi par son opposition épicurienne au piétisme réformé; voulant faire de Genève une ville où l'on s'amuse, il prit notamment la défense des jeux de hasard et des maisons de tolérance. Sur le plan cantonal et fédéral, il préconisa des mesures étatistes souvent repoussées par le peuple; il proposa ainsi sans succès l'assurance maladie généralisée et les syndicats obligatoires. A Genève, il s'opposa en vain à l'introduction de la représentation proportionnelle, au vote à la commune et à la loi sur l'incompatibilité. Il fut par contre l'un des artisans de la loi scolaire de 1886 qui modernisa l'instruction publique genevoise. Au Conseil d'Etat, il développa l'université par la création des policliniques, l'agrandissement des bâtiments et l'extension des sciences sociales; il voulait ouvrir ce dernier enseignement aux principales écoles de pensées, libérale, socialiste et chrétienne. Chef charismatique, tribun et polémiste plus qu'homme de gouvernement, Georges Favon donna un nouveau souffle au parti radical genevois en l'engageant sur le terrain social, mais son bilan est contrasté: succès dans le domaine scolaire et universitaire, échec de projets sociaux pour lesquels l'opinion n'était pas mûre et défense d'options dépassées en matière de droits électoraux.


Bibliographie

  • G. Busino, S. Stelling-Michaud, Matériaux pour une histoire des sciences sociales à Genève, 1965
  • Gruner, L'Assemblée, 1, 945-946
  • Livre du Recteur, 3, 283

Source

  • Dictionnaire historique de la Suisse  Marco Marcacci

 


Discours prononcé par Georges Favon le 30 octobre 1898 lors de l'inauguration du Temple maçonnique de la rue Bovy-Lysberg à Genève. 
 

Notre première parole aujourd'hui comme notre première pensée selon la tradition des citoyens suisses est pour la Patrie.

Nous souhaitons à notre Patrie, à notre bien aimée Confédération suisse  - nous n’avons pas besoin de dire pourquoi nous l'aimons  - nous lui souhaitons de rester l'asile inviolable de la liberté et de la justice, d’être toujours la gardienne de nos intérêts supérieurs d’indépendance et de liberté, d’être toujours davantage la patrie de nos cœurs et la chaste maîtresse servant la justice, la vérité et égalité.

Mes chers amis, mes Ch.' . FF.'. c’est une chose qui trouble parfois la conscience des jeunes maçons qui se présentent dans nos ateliers avec un esprit ouvert, avec le désir de comprendre, par conséquent de bien servir notre association fraternelle, c’est, dis-je, une chose qui les surprend parfois de voir la Maçonnerie, la grande École de la fraternité universelle, s’attacher avec autant de soin, avec une semblable sollicitude aux intérêts de la patrie. Ils se demandent souvent s’il n’y a pas quelque contradiction entre ce caractère de famille universelle qui nous appartient et ce souci de nos intérêts patriotiques. Nous voulons tous être des citoyens soucieux des intérêts et de l’honneur de notre patrie.

L’explication n’est pas difficile à trouver. Si j’en voulais une preuve, je la trouverais dans la solennité d’aujourd'hui l’union des FF.’. de Genève dans cette maison de la rue Bovy-Lysberg. Il y a là des FF.’. qui appartiennent à plusieurs patries ; c’est une grande leçon qui montre combien il est nécessaire de travailler chacun à la place où nous sommes ; nous ne pouvons rien, si nous ne sommes aidés par des consciences à l’unisson des nôtres.

Nous avons dans notre maison maçonnique une loge qui appartient à cette grande et haute puissance maçonnique, qui s’appelle le G.'. O.’. de France : nous avons des FF.' . qui sont républicains et Français et j’espère bien que ces deux noms ne se sépareront jamais. Si nous avions besoin qu’on nous rappelât cette solidarité supérieure des peuples, si nos consciences et nos espérances étaient descendues assez bas pour ne pas savoir quelle puissante solidarité unit les peuples, les faits nous le rappelleraient. Si je dis qu’il faut que la France se garde d’abandonner ses institutions républicaines, si je dis qu’elle doit rester la directrice de nos idées, c’est que si elle faisait une chute, nous en ressentirions le contrecoup, parce que son honneur et sa force sont la force et l’honneur de tous les républicains.

Puisque je parle de cette maison dont nous fêtons aujourd'hui l’inauguration, un souvenir reste grave dans nos mémoires. Des FF.'. de Genève qui nous valaient bien par la fidélité aux principes et par la hauteur de l’esprit, ont tenté jadis de réunir tous les maçons dans une même maison. Ils ont peut-être mal conçu leur plan, ils ont oublié qu’à côte de l’union qui est désirable, il faut maintenir le milieu qui convient à chacun, ils ont voulu marcher trop vite, ils ont échoué.., c’est une leçon pratique dont il faut profiter ; nous laissons à chacun, à chaque famille sa liberté complète, nous faisons l’unité par en haut au lieu de la faire par la centralisation administrative ; nous osons dire qu’il y a là une leçon pour une plus grande famille, celle de l’humanité tout entière.

L’ancienne maison n’est plus à nous, elle est aux pires adversaires de la F.’. -M.’., elle est au clergé, et les rites de la messe ont remplacé les rites sacrés de liberté, de justice et d'égalité qui font l’honneur de tous les maçons.

Voilà à quoi l’on s’expose quand on ne joint pas la prudence à la fermeté, et quand on n’est peut-être pas retenu par le sentiment de la modestie et de l’humilité qui doit soutenir la faiblesse de nos efforts.

Notre mérite est dans notre désir de travailler ; que l’avenir nous préserve d’une chute pareille, mesurons les pas en avant, mais proclamons que la Suisse ne fera jamais un pas en arrière.

A mes FF.'. de France je répète que nous avons à nous rendre service mutuellement, vous êtes les grands, nous les petits nous vous devons cette admirable révolution qui a fait la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, déclaration à laquelle on pourra peut-être ajouter quelque chose mais à laquelle on ne peut rien retrancher, sans l’arracher du coeur même de la démocratie. À vous qui avez fait de si grandes choses pour la démocratie, la république et l’humanité, nous témoignons toute notre reconnaissance et nous vous souhaitons de pouvoir rester fidèles aux règles que vous avez tracées. Mais si jamais, par malheur, ces grandes vertus ne pouvaient plus être pratiquées librement dans votre pays, ce que nous souhaiterions à notre patrie suisse, ce serait de conserver un asile où les grands exemples puissent être respectés, et où tous ceux qui veulent vivre librement soient entourés d’une atmosphère de liberté et de fraternité.

Je lève mon verre à la noble patrie suisse petite par le nom, j’espère toujours plus grande par les sentiments, par les aspirations. par la solidarité : je lève mon verre aussi aux autres patries et à ce pays de France à qui les hommes de solidarité doivent tant de choses.

A la patrie suisse, à  l’asile de nos libertés et de notre indépendance: à tous les pays qui ont servi la liberté, à toutes les démocraties, à la démocratie universelle.

Source :

  • La Loge Fidélité et ses ancêtres. 1871 - 1971 - 1996.
  • Dictionnaire historique et biographique de la Suisse. Erard-Heggenzi.
  • Administration du D.H.B.S. Neuchatel 
  • Notice sur le Temple maçonnique de la Rue Bovy-Lysberg à Genève